Après la panique et la peur engendrées par la pandémie Covid-19, la population, surtout celle fréquentant et habitant le côté sud de la capitale haïtienne (Port-au-Prince) est terrorisée par les groupes armés qui l’imposent leurs propres lois.
Si les autorités étatiques n’arrivent pas à convaincre la population à rester chez elle malgré l’alerte rouge du nouveau coronavirus, les autorités déclarées du Bicentenaire, de Village de dieu, de Martissant forcent les gens à s’enfermer chez eux.
Depuis le début de cette semaine, ces groupes continuent à semer la terreur. Plusieurs journaux ont même rapporté qu’il y a beaucoup de morts dans cette guerre de gangs. Selon des riverains qui commencent déjà à fuir leur maison pour aller habiter chez des proches, les groupes armés qui s’affrontent entre eux et avec la Police ont fait, une semaine avant, cette déclaration de guerre, alors que le gouvernement ne prenait aucune disposition pour empêcher une telle situation.
Cette guerre débute d’un désaccord entre “Baz Pilat”, et les groupes armés de Village de dieu pour la gestion du territoire.
Les tirs résonnent. Le Portail de Léogâne, surtout une partie du boulevard Jean Jacques Dessalines et de la rue Oswald Durand, devient un espace abandonné. Des personnes, obligées de laisser leur maison à la recherche du pain quotidien, sortent avec la peur au ventre.
“Je ferais mieux d’aller habiter chez ma fille qui vit à Nazon, parce que la situation devient vraiment insupportable”, soutient une marchande.
“Si cela reste ainsi, je laisse la maison pour aller ailleurs” affirme un homme de la rue Fleury Bastier qui craigne ce mardi 14 avril 2020 l’arrivée des groupes armés dans sa zone. Il faisait référence à l’opération des groupes armés à la 5eme avenue ce 14 avril.
Confinement forcé. Situation désastreuse. C’est en ces thèmes qu’un chauffeur de taxi moto comprend la situation. Le taximan s’inquiète de ses journées dans ce circuit. “Déjà avec la question du coronavirus, la circulation était ralentie, avec les échanges de tirs, elle s’aggrave encore plus”, avance-t-il, indiquant qu’il ne va pas trouver de clients. Les recettes diminuent considérablement. “Pa gen lari monchè”, dit-il. Les petits commerces et le transport public ralentissent.
Pourquoi l’État ne se prononce pas sur cette situation ? Cela fait aussi partie de la protection de la vie de la population, au même titre qu’on veut le faire pour la crise sanitaire (COVID-19), se questionne un autre jeune homme.
Pour résoudre ce problème de sécurité publique, l’on doit trouver les sources de financement, les sources d’approvisionnement des bandits, pense un riverain de la ruelle Alerte.
Il faut rappeler que plusieurs institutions d’État au Bicentenaire ne fonctionnaient pas, ou fonctionnaient au ralenti, à cause des guerres de gangs, et ce, bien avant la crise de la pandémie Covid-19. Carl Murat Cantave, président de l’Assemblée nationale d’alors, avait déclaré qu’il allait louer un espace dans un hôtel à Pétion-Ville pour loger quelques bureaux, jugés importants, pour que le Sénat puisse fonctionner. Juste pour fuir les balles des bandits.
La loi des groupes armés est plus forte que celle du Parlement, pourrait-on dire. Nul n’est censé ignorer la loi des bandits. Si bien que des magistrats, avocats du Parquet de Port-au-Prince s’étaient obligés de laisser leur espace de travail sous ultimatum des bandits du Bicentenaire.
Les groupes armés avaient l’habitude de forcer les gens qui travaillent à la Primature, au Parlement, au Parquet de Port-au-Prince et aux Archives Nationales à se confiner.
Autrement dit, même les autorités de l’État fuient leur espace de travail sous pression des balles des bandits. Et qu’en est-il de ceux qui n’ont pas d’autre choix que de rester dans ces endroits ? Il faut mentionner la fameuse déclaration de Carl Murat Cantave, ancien président du Sénat: “habiter à La Saline est un choix”. Comme si tout le monde aurait le choix d’habiter des quartiers chics, des espaces luxueux ou des quartiers déclarés zones défavorisées.
En tout cas, si les autorités établies n’arrivaient pas à imposer le confinement, qu’il soit total ou méso, les autorités déclarées du côté sud de la capitale sembleraient rendre un grand service au gouvernement. Et la pandémie Covid-19 qui a déjà fait 3 morts pour 40 cas confirmés dans le pays, selon les chiffres officiels, semble ne pas effrayer les groupes armés qui continuent à terroriser la population.
Francisco BONHOMME et Brunel Duméus